Depuis des années, les titres des media ont déclaré pour mort le commerce de détail stationnaire – il serait victime du commerce en ligne. Mais pendant que plusieurs détaillants connus ont en effet cessé leurs activités ou fermé des filiales, de plus en plus de marques natives à l’origine du numérique investissent dans des surfaces stationnaires afin de compléter leur offre en ligne.
Lors du dernier EuroShop, le salon leader pour tous les biens d'équipement du commerce de détail et de ses partenaires, il y avait déjà les premiers signes que Pure Player et les start-ups en ligne se tournent de plus en plus vers la vente stationnaire. 3 ans plus tard, à l'EuroShop 2020 du 16 au 20 février à Düsseldorf, en Allemagne, ce sera désormais l'un des thèmes majeurs de l'industrie.
Un rapport publié fin 2018 par la société immobilière JLL prédit même que les détaillants en ligne aux États-Unis ouvriront plus de 850 filiales dans les cinq ans à venir. Cela montre la valeur que ces marques attachent à une présence physique. « Tout le monde prétend que le commerce stationnaire se meurt, mais les marques d’e-commerce poussent assez vite et agressivement vers le secteur stationnaire », dit dans ce rapport Taylor Coyne, directeur des recherches du secteur Retail chez JLL.
Malgré des chiffres d’affaires en ligne toujours croissants, la plupart des consommateurs continuent de préférer l’expérience d’achat en magasin, et de plus en plus de marques d’origine numérique mettent à profit le commerce stationnaire.
Online et offline : le meilleur des deux mondes
Aux États-Unis, Warby Parker, le distributeur en ligne de lunettes, a ouvert sa première surface stationnaire en 2013 (trois ans après sa fondation) et exploite à présent plus de 90 magasins dans tous les États-Unis et au Canada. Il est souvent cité en exemple d’une des premières marques purement numériques à avoir compris que l’online et l’offline se complètent en tant que canaux.
Récemment encore, la société de cosmétiques Glossier, qui était au départ active uniquement en ligne, a créé une sensation mondiale avec ses pop-up shops, showrooms et le flagship store à New York. Elle a été appelée un disneyland pour adultes, qui propose une expérience d’achat extraterrestre.
Même le géant de l’online Amazon – l’ennemi juré des emplacements de prestige – s’est avancé dans le commerce stationnaire avec Amazon Books, Amazon Go et Amazon 4-Star.
Selon Coyne, ces entreprises rationalisent, comme beaucoup d’autres, leurs offres, et mettent au centre l’expérience au magasin.
Le flagship store de Glossier à New York, ouvert vers la fin de l’année dernière, s’étend sur trois étages et est conçu en tant que point de rencontre communautaire immersif, où les clients peuvent faire connaissance avec la marque et entre eux. La surface développée ensemble à Gachot Studios et au cabinet d’architecture PRO invite les clients à « se détendre » ensemble à des rédacteurs offline, à essayer et acheter des produits, et à plonger dans l’univers Glossier. Selon un article du New York Times, le store offre exactement ce qui va très bientôt devenir les 3 C de l’ère numérique : communauté, conversations et contes.
En Europe, le commerce de chaussures en ligne polonais Eobuwie.pl a lui aussi récemment posé un pied sur le « sol stationnaire », à savoir avec un concept nouveau qui relie sur la surface et sans rupture le numérique et le stationnaire, en une alternative passionnante au commerce de chaussures traditionnel, idéale pour le shopping. Le store développé par Dalziel & Pow, dont le siège se trouve en Grande-Bretagne, est numérisé : il n’y a plus aucun produit physique sur la surface. Au lieu de cela, les clients cherchent et commandent sur des tablettes tactiles interactives leurs chaussures, qui leur sont ensuite remises depuis le stock gigantesque en passant par un système d’étagères situé derrière la caisse.
« Ce concept ambitieux et exigeant combine le confort des courses en ligne avec la satisfaction immédiate des besoins propre au commerce stationnaire », explique David Dalziel, le Creative Director de Dalziel & Pow, qui a déjà travaillé également pour les marques online Missguided, Boden ou Joe Browns.
Selon Dalziel, ces nouveaux formats offrent du service et du divertissement, et par là transgressent souvent de vieilles règles de service clients, de dotation en personnel, d’approvisionnement ou aussi de conseil, afin d’optimiser l’expérience du client.
Les expériences, comme le détaille Dalziel, se trouvent au centre absolu de l’attention chez les marques qui arrivent nouvelles sur la surface, et quand à ce moment l’espace de vente au détail soutient en plus l’offre en ligne, alors les effets peuvent être énormes.
Le rendement de l’expérience
Quand on veut comprendre aujourd’hui les vrais avantages de l’ouverture de magasins stationnaires, on doit réévaluer le rôle du local commercial et reconsidérer les mesures prises traditionnellement pour des commerces de détail prospères, revendique Michelle Du-Prat, cofondatrice de Household Design. « De plus en plus, les clients essaient des produits au magasin et les achètent ensuite en ligne. C’est pourquoi le commerce de détail doit se séparer du chiffre d’affaires par mètre carré en tant qu’indicateur de son succès et reconnaître le rôle que le magasin remplit au-delà de cela – en tant que moteur de chiffres d’affaires online, moteur qui développe un attachement à la marque et favorise la fidélisation à long terme du client. »
Selon Nigel Collett, le gérant du cabinet d’architecture et conseil en design rpa:group, il s’agit maintenant de se concentrer sur le « rendement de l’expérience » et non pas sur le retour sur investissement. Car alors les chiffres d’affaires à court terme sont repoussés en faveur de la création de relations clients à long terme. « Les marques online ne sont pas promues par le retour sur investissement d’un emplacement, mais tournent leur regard vers un impact plus large, appelé l’effet halo. »
L’effet halo
Il est intéressant qu’une nouvelle étude au Royaume-Uni sur ce qu’on appelle l’« effet halo » laisse supposer que les détaillants qui n’entretiennent pas de surface physique en plus d’un site Web de transactions enregistrent typiquement 50 % de chiffre d’affaires en ligne de moins que les détaillants qui sont présents de façon stationnaire. L’étude de CACI a montré que les chiffres d’affaires moyens sont plus élevés de 106 % dans la zone de chalandise d’un magasin stationnaire, et peuvent aller jusqu’à 124 % dans les vêtements de sport, jusqu’à 127 % dans la mode, et même jusqu’à 154 % dans l’électronique.
Depuis qu’Eobuwie.pl a ouvert ses magasins numérisés en Europe de l’Est (six au total à présent, et d’autres doivent suivre), l’entreprise a pu augmenter son chiffre d’affaires de pas moins de 70 %.
Dans une étude similaire aux États-Unis, sur comment le stationnaire influence l’online, on a trouvé que l’ouverture d’un nouveau magasin dans un marché mène en moyenne à 37 % de fréquentation en plus sur le site Web du détaillant, en comparaison de la fréquentation du webshop avant l’ouverture du store. Par ailleurs, l’étude laisse supposer que l’effet halo a aussi un impact inverse quand un magasin ferme, car alors la fréquentation du site Web baisse.
« Lors de la planification, les détaillants doivent toujours prendre en considération comment la présence de surfaces stationnaires – des lieux où les clients peuvent non seulement voir les marchandises de près mais aussi interagir avec les vendeuses et même échanger des marchandises – peut influencer la relation profitable des deux côtés entre le commerce hors ligne et le commerce en ligne », dit le rapport, publié par l’International Council of Shopping Centers (ICSC).
Les verticaux qui étaient à l’origine numériques comme Allbirds ou Casper, et qui ont ouvert des magasins pour des segments de marchandises allant de la mode masculine aux matelas, montrent à quel point les magasins stationnaires sont indispensables à la mixture du commerce de détail, conclut le rapport de l’ICSC « Les locaux commerciaux sont des lieux où les marques peuvent entrer réellement en contact avec le client, des clients beaucoup plus informés aujourd’hui que par le passé. »
Casper – le distributeur mondial de solutions sommeil fondé en 2014 – avait d’abord ouvert, à la demande de ses clients, un certain nombre de pop-up shops en Amérique du Nord en 2017, avant d’ouvrir son premier magasin fixe au début de 2018. « Le souhait de faire l’expérience personnelle de nos produits a continué d’augmenter de manière exponentielle », disait le cofondateur et gérant de Casper Philip Krim au début de l’expansion vers le commerce de détail. « Les surfaces de vente Casper permettent le passage sans rupture de l’online à l’offline, et nous pensons que c’est extrêmement important pour un achat-expérience exceptionnel. »
Le distributeur de dessous en ligne Adore Me est lui aussi allé vers le commerce stationnaire en 2018, à la demande de ses clients. « Au vu de notre croissance, mettre en place des magasins dans plusieurs villes des États-Unis était pour nous une démarche passionnante mais aussi logique », selon Iris Voltaire, directrice du développement des affaires et du marketing chez Adore Me. « À notre avis, la demande de magasins physiques est en relation avec l’aspect émotionnel, intime, de vouloir essayer des dessous. Nous voulons laisser le choix à nos clients de venir en nos magasins et de toucher nos produits et tissus, et même de faire un essayage personnel avec nos stylistes. »
En fin de compte, c’est l’expérience qui compte dans tout cela. Afin de monter un store réussi, les détaillants devraient se démarquer de la concurrence par une touche spécifique dans le domaine de l’expérience, conseille Nathan Watts, Creative Director chez FITCH. « Que représente la marque et quelle en est l’importance pour le client ? C’est à partir de là qu’on devrait choisir les emplacements et les assortiments, avec la minutie et la sollicitude d’un commerçant en ligne. En ce qui concerne les emplacements et les ouvertures, il peut être mieux d’en faire moins, car il est utile de définir des priorités dans de tels investissements et d’investir de façon focalisée au lieu de saupoudrer et de créer des expériences interchangeables. »
En fait, les clients veulent un voyage de shopping sans frontières, et c’est pour cela que les commerçants devraient essayer d’intégrer leurs canaux online et offline, afin d’assurer une expérience de marque continue. « La vraie opportunité s’offre quand l’online et l’offline sont des points de contact qui ne s’opposent pas mais qui s’intègrent, que le client doit savourer et qui font partie d’une seule et même expérience d’achat », dit Watts. La question n’est pas si l’online ou l’offline ont un avenir, mais comment les marques peuvent faire bon usage des deux.
Spécialement pour Pureplayer, EuroShop est la plateforme idéale pour trouver toutes les solutions nécessaires à l'exploitation des magasins fixes. Cela s'applique non seulement à la technologie, mais surtout à l'aménagement des magasins, au merchandising visuel, à l'éclairage et aux solutions de marketing digital pour le point de vente. Chez EuroShop, l'ensemble de la gamme des composants nécessaires sera couvert afin de transformer l'univers du shopping en univers d'expérience pour le client.
L’EuroShop 2020 sera ouverte aux visiteurs professionnels du dimanche 16 au jeudi 20 février 2020 tous les jours de 10 à 18 h. Le ticket journalier coûte 80,- euros (60,- euros en prévente en ligne / E-Ticket), le ticket 2 jours, 120,- euros (100,- euros en prévente en ligne) et le ticket permanent, 180,- euros (150,- euros en prévente en ligne). Les tickets comprennent l’aller-retour gratuit à l’EuroShop par les transports en commun VRR (Verkehrsverbund-Rhein-Ruhr). www.euroshop.de
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